Hélène (Maurice) Charlebois, coiffeuse, raconte comment les choses ont changé pour elle et plusieurs autres, pendant la pandémie.
Maxime Pronovost
Hélène Charlebois pratique la coiffure au Villageois (Le complexe rendez-vous Lafontaine) depuis maintenant 10 ans, et au Hillcrest Village Care Center à Midland. Les décisions prises en matière de protection de la santé publique alors que survient la crise sanitaire de la COVID-19 ne lui permettent plus d’accéder aux centres dédiés aux personnes âgées. Pourtant, la demande pour la rencontrer demeure très forte, et ça n’a que très peu à voir avec les cheveux.
Le 20 mars, Hélène Charlebois rentrait au travail sachant qu’elle n’allait plus pouvoir y rester travailler très longtemps en raison de la pandémie. Comme elle nous racontait : « Au centre Hillcrest, le grand boss voulait me rencontrer […] je savais ce qui s’en venait ».
C’est alors qu’elle a appris qu’elle ne pourrait plus y retourner pour coiffer les têtes habituelles. On lui a offert d’y travailler comme ménagère, à raisons d’une trentaine d’heures par semaine: «On désinfecte tout, les poignées de porte, les rampes, les tables, il faut tout nettoyer. On sait qu’il y a plusieurs personnes à risque et c’est un travail important qui doit être fait. Évidemment, je ne voulais pas rester à rien faire, alors je fais ça, mais j’ai hâte de recommencer à coiffer parce que je m’ennuie de mes clients, je m’ennuie des gens avec qui j’étais et avec qui j’aime parler».
Certes, la situation actuelle a quelque chose d’inquiétant, particulièrement pour des groupes à risque. Ces gens à risque ont un accès privilégié à Hélène, qui les écoute, comprend leurs craintes, leurs inquiétudes, mais aussi avec qui ils partagent leur bonheur et leur bien-être au jour-le-jour.
Ce que fait Hélène d’habitude, est beaucoup plus que de la coiffure, pour beaucoup de résidents des centres pour personnes âgées. Elle apporte un certain équilibre auprès de gens qui peuvent assurément se sentir seuls au quotidien. Hélène nous disait: « Les gens se confient à moi, ils viennent me voir, s’assoient confortablement et ils parlent de tout, pour une question de confiance, ils s’ouvrent plus avec moi qu’ils le ferait en temps normal avec une infirmière ou d’autres employés des centres de personnes âgées […] « You’re my therapy » me disait une cliente ». L’envie d’arrêter de coiffer n’y était pas. Il n’y a pas une semaine qui passe sans qu’on l’appelle chez elle pour lui demander à quand sera son retour au Villageois ou pour lui dire «J’ai besoin de te rencontrer».
Des confidences essentielles
Évidemment, d’avoir les cheveux un peu plus longs ou une teinture qui est dûe ne tue personne. Pourtant, il y a quelque chose d’essentiel qu’on décèle dans le discours d’Hélène Charlebois, qui a tout à voir avec le contact humain, avec la « chaleur au coeur » pour utiliser ses mots: « de les écouter me parler (les personnes âgées) m’apporte beaucoup de chaleur, ils me disent des choses personnelles qui leur font du bien. Parfois au Villageois, ils veulent juste venir me parler, les gens ont besoin de contact humain. Le salon est étroit et je les vois se rapprocher pendant que je termine de coiffer quelqu’un, je les vois du coin de l’oeil, ils s’approchent et attendent, ils veulent juste venir me voir et attendent que j’aie terminé avec la cliente ».
Plusieurs résidents qui ont des familles éloignées, ou sont seuls se sont retrouvés du jour au lendemain confinés et ne peuvent plus voir autant de gens qu’auparavant. « Certains ne comprennent pas que le gouvernement ne nous permet pas de rentrer travailler, mais que c’est pour notre bien ».
Hélène Charlebois ajoutait qu’il serait bon pour tous qu’elle puisse retourner, simplement pour la santé mentale des personnes âgées.
« On entend parler que le gouvernement ouvrira les salons de coiffures prochainement, mais les salons de coiffure dans les centres de personnes âgées, c’est pas certain qu’ils vont ouvrir en même temps. Si je pouvais, je retournerais couper les cheveux dès demain matin, les gens me manquent trop. »
Un petit conseil
Lorsqu’on a soulevé que certaines personnes se coupaient elles-mêmes les cheveux pendant que les salons sont fermés, Hélène a répondu: « Soyez patients! Coupez-vous pas les cheveux vous-mêmes! On voit qu’il y en a qui se coupent le toupet, c’est pas si pire, mais des fois « oh boy! (rires) ».